Jouant de la luminosité et de l'obscurité, de l'apparition et de la disparition, Saburo Teshigawara met en scène les danseurs sur un plateau dénudé, troublé par des effusions de fumées qui viennent brouiller la perception.

Les ténèbres sont là où se cache la vie.
Dans les ténèbres, au-delà de l'obscurité, se cache
un cheval aux yeux noirs brillants.
Dans les ténèbres se cachent toujours un, ou trois,
ou cent chevaux noirs, retenant leur souffle, à l'affût.
La vie fragile apparaît et disparaît.
Le fluide est une vie qui se transforme.
Il n'a ni vie propre, ni passé, ni mémoire,
ni de disposition pour les temps à venir.
Ce n'est qu'un plasma, une vibration-minute
avant la naissance.
Un fluide semi-transparent flottant.
Il faudra encore un peu de temps avant que cette chose
puisse être appelée vie.
Le premier souffle de la vie fragile gonfle les ténèbres.
La vie fragile s'étend et se contracte dans toutes les
directions, faisant vibrer l'obscurité profonde et épaisse.
Le flux incessant semble tout atteindre.
Le cheval noir immobile de l'obscurité avale le flux
de vie et se transforme.
La vie fragile engloutie se transforme également.
Une gravité soudaine devient pur mouvement
incontrôlable, comme s'il voulait détruire la vie.
L'obscurité et la vie entrent en contact, fusionnent et se
pénètrent l'une l'autre, se désirant mutuellement avec une
telle intensité que cela pourrait les détruire toutes les deux.
Un cristal cosmique d'éternité et d'instantanéité.
Un cristal fluide à jamais ininterrompu.
L'instant suivant, le cristal se désintègre, fusionne
et s'assemble à nouveau, fusionne et se désintègre,
puis fusionne et s'unit, et ce, à l'infini.
La vie fragile continue à s'écouler tel un torrent.
L'obscurité plonge le monde dans les ténèbres.
( Saburo Teshigawara )

Première : 31 octobre 2013, Opéra National de Paris - Palais Garnier (FR).

Avec : Aurélie Dupont, Nicolas Le Riche et Jérémie Bélingard
Chorégraphie, conception décor, lumières, costumes : Saburo Teshigawara
Éléments sonores : Tim Wright, Akira Oishi
Dissenting Voices de Daniel Burke (Illusion of Safety), extrait de Water Seeks Its Own Level édité par Silent records. c.1994 www.illusionofsafety.net, www.danieljamesburke.net
Assistante du chorégraphe : Rihoko Sato
Assistant lumières : Sergio Pessanha
Assistant plateau : Kazuomi Kurosawa